12 PETITS INSTANTS D'ARBRES

 

 

Serait-il une prière

ce grand chêne

qui conduit silencieux

ses branches au ciel ?

 

Et que demande-t-il ?

 

Une saison d'humanité

ou juste un peu de bleu

pour son voyage ?

 

*

 

Dans un  rai de mémoire

garder sauve

l'image de l'oiseau

allumant le sorbier

 

*

 

Là-bas

- sous l'eau noire du ciel -

un arbre grelotte

et cabre sa colère

 

*

 

Sur le papier du ciel

des peupliers peignent

le printemps au calame

 

*

 

Ecrire

l'eau chantante du ciel

et les chapelets rouges

des alisiers

fera peut-être l'oiseau

 

 *

 

 

La page du ciel

que délivre la vitre

le saule à lui seul

en connaît

les petites intimités

 

 

*

(suite)

 

Et si sourire était

ce parfum d'aubépine

à l'ourlet d'un printemps ?

  

*

 

Et si pleurer était

- au fond du jardin -

ce vieil acacia

qu'on ne regarde plus ?

 

*

 

Les cerisiers étaient en marche

les genêts   

les coudriers galants

et les saules bleus des écluses

 

Alors je les ai suivis

- comme on suit une fanfare -

à jeune gorge 

à jambes nues

et j'ai dansé le printemps

tout un vallon

 

*

 

Ces saules agenouillés

au bord de la rivière

demandent-ils aux hommes

un peu plus de sagesse

ou à Dieu le défi d'un miracle ?

 

*

   

Le soir écroule son ciel

à la cime d'une tristesse :

mon cerisier est mort !

 

*

 

Des aquarelles tremblent

sous le lavis silencieux du parc

et de la lumière flirte

avec les arbres maigres

qui reviennent de pluie

(comme on revient de noce

            un peu penchés

            un peu gris)

 

 Marie Desmaretz ©